Aujourd’hui nous allons encore une fois tenter de mieux comprendre la science en général, cette fois en étudiant les organismes modèle. Un organisme modèle est un organisme vivant qu’on utilise dans nos études. Ce sujet est connu pour être controversé, donc j’espère qu’avec cet article je peux montrer à quel point les études sur organisme vivant, aussi appelé études in vivo, sont essentielles, et à quel point elles ont fait avancer la science. La semaine prochaine, nous verrons les modèles qui n’utilisent pas les animaux, appelées les études in vitro.
Avant de commencer, on a besoin de répondre à une question: pourquoi utilise-t-on encore des animaux de nos jours? La réponse est assez simple, c’est qu’on a pas encore vraiment le choix. Il est vrai que la science a découvert énormément de nouveaux modèles, comme on le verra la semaine prochaine, mais aucun de ces nouveaux modèles ne peut donner tout ce qu’un animal peut. Un exemple est l’étude de médicament. Disons qu’un labo a découvert un médicament potentiel pour les maladies cardiaques. Après des années d’études sans animaux, le labo confirme que le médicament fonctionne in vitro. Mais on ne peut pas conclure qu’il marche aussi in vivo. Et si ce médicament augmentait les risques du cancer? Puisque la plupart des modèles in vitro ont une durée de vie assez courte, on ne peut pas le savoir tant qu’on n’a pas testé le médicament in vivo. Par contre, il est interdit d’injecter des médicaments dans les animaux si aucune étude in vitro n’a été faite avant. Nous verrons plus tard le code éthique pour les études animales, mais une des notions fondamentales est le confort de l’animal. L’animal ne peut pas souffrir inutilement, donc injecter un médicament sans savoir vraiment ce qu’il fait est non seulement illégale, mais punissable. Nous utilisons aussi les animaux pour étudier les maladies. Nous n’avons pas encore de bons modèles in vitro qui nous permettent d’étudier les maladies. Mais grâce à ses animaux, nous avons pu découvrir des centaines de médicaments et sauver des vies. Pour mieux comprendre l’utilisation animale, je vais donner quelques exemples de modèles in vivo et comment on les utilise [source / source / source / source].
Les levures et les mouches: les pionniers de la génétique
On commence par un modèle assez peu connu: la levure, principalement celle nommée Saccaromyces cervisiae. Cette espèce nous a permis de comprendre comment les gènes et la génétique dans son ensemble fonctionnent. Comme c’est un petit organisme, son génome (c’est-à-dire l’intégralité de ses gène) a été compris très vite. Du coup, on a pu observé comment les gènes interagissent entre eux, et la conséquence sur la transcription et la traduction. De plus, les levures se reproduisent très vite, ce qui nous permet d’étudier les conséquences de la génétique sur plusieurs générations. Pour les mêmes raisons, on utilise également la mouche, particulièrement la drosophile nommée Drosophila melanogaster. Les mouches ont les mêmes avantages que la levure, à savoir la rapidité de reproduction, leur léger coût, et la compréhension de leur génome, mais on y ajoute un bonus: les mouches ont une anatomie distincte. Alors que les levures ne sont que des blobs de cellules, les différentes parties anatomiques d’une mouche sont très facile à reconnaître. Cela nous permet de comprendre la relation entre la génétique et le développement, par exemple connaître quel gène est responsable de la production des jambes ou quel gène change la couleur des yeux. Malheureusement, ces deux modèles ont également leurs désavantages, le principal étant que leur génome est très différent du nôtre. Bien que quelques gènes sont identiques entre humains et levure ou mouche, il est difficile de relier les observations faites dans ces organismes aux humains. De plus, ces organismes ont peu de comportements distincts, ce qui nous empêche d’étudier les interactions entre les gènes et les comportements [source / source / source].
Les grenouilles aident à mieux comprendre les protéines et les cellules
Il existe une espèce de grenouille qui possède des outils essentiels à l’étude des cellules. La Xenopus laevis est une grenouille africaine qui produit des oeufs, ou oocytes, très particuliers. En effet, une grenouille produit un très grand nombre d’oeufs, et dans ceux-ci, chaque cellule a un rôle pré-determiné. Cela veut dire que nous savons exactement ce que chaque cellule va faire pour devenir un têtard. Cette particularité est essentielle pour étudier le développement. Par exemple, si on sait qu’une cellule produit des neurones, on peut savoir ce qu’il se passe si on la déplace légèrement, et à quoi le têtard va ressembler. De plus, les oocytes sont très résistants: il résiste aux injections et aux manipulations, ce qui le rend facilement modifiable. Par exemple, on peut y injecter un gène et voir son rôle sur le comportement de la cellule. Enfin, les oocytes peut être cultivés pour devenir des modèles in vitro. La plus grande utilisation des oocytes est également dans l’étude des protéines. On peut injecter plusieurs protéines et voir comment elles interagissent entre elles pour mieux les comprendre [source / source].
Les mammifères nous permettent de comprendre les maladies et les comportements complexes
Les mammifères font partie des organismes modèles les plus utilisés, et avec raison. Ils ont des comportements complexes, ainsi que des pensées complexes qui se comparent à celles des humains. Il y a beaucoup de mammifères qui sont utilisés, mais les plus communs sont les souris, les rats et les primates. Simplement les observer sans manipulation nous permet de comprendre les comportements sociaux complexes et les comparer aux humains. Mais on peut également étudier les changements de comportements et de physiologie en cas de maladie. C’est par leur similarité avec les humains qu’ils deviennent des modèles importants. Les rats et les souris sont similaires, mais leurs petites différences peuvent influencer nos recherches: les rats sont plus gros, ce qui les rends plus facile à manipuler. De plus, ils sont génétiquement plus proches des humains que les souris. Mais ils ont un gros désavantage: il est difficile de les manipuler génétiquement. À l’inverse, les souris sont très facile à manipuler. Cela nous a permit d’avoir des modèles de souris pour plusieurs maladies, ce qui nous permet de mieux comprendre la maladie dans un contexte vivant. Les primates quant à eux sont intéressant pour étudier les comportements de groupe. Ils sont également les modèles les plus proches de nous, et peuvent nous donner des informations essentielles sur la cognition, la mémoire, et les comportements plus complexes. Mais c’est extrêmement difficile de travailler avec les primates, et il est presque impossible de les manipuler génétiquement, bien que très récemment un groupe en Chine a réussi à modifier des singes [source / source / source / source].
Le code éthique pour la protection des animaux: les 3R
Au Canada, travailler avec des animaux est non seulement difficile mais aussi extrêmement régulé. Le Conseil Canadien de Protection des Animaux (CCPA) a établi plusieurs règles à suivre quand des labos utilisent des animaux, et les fondamentales sont appelées les 3R. D’abord, la règle du Remplacement nous force à prouver que nous avons besoin des animaux dans notre étude. Si un modèle in vitro est capable de montrer ce que nous voulons prouver, nous n’aurons pas accès à un animal pour notre étude. Ensuite, la règle de la Réduction force l’optimisation de l’utilisation des animaux. Chaque labo doit déterminer combien d’animaux il aura besoin par an. Ce nombre doit être le plus petit possible, et ne doit pas être dépassé. Enfin, la règle du Raffinement renforce l’idée du confort de l’animal avant tout. Aucun animal ne doit souffrir ou être stressé inutilement. Toute cause de stress ou de douleur doit être prouvée comme étant importante pour l’étude, autrement elle est interdite. De plus, le confort de l’animal doit être assuré quand il n’est pas utilisé dans l’étude. Par exemple les souris sont mises en groupe et pas seule pour empêcher le stress (à moins que l’étude demande à ce que les souris soient séparées). De la même manière, les primates ont des temps de jeu, d’exercice physique, et d’activités sociales tous les jours. Si vous êtes intéressés le site du CCPA expliquent en plus grand détail ces règles, ainsi que toutes les autres régulations obligatoires [source / source / source / source].
J’espère que cet article montre à quel point les organismes modèles sont importants pour la science. Je comprends que ce sujet met mal à l’aise, il est important de comprendre que non seulement nous traitons les animaux le mieux qu’on peut, mais aussi que nous n’avons pas vraiment le choix d’utiliser ces animaux pour l’instant. Les organismes modèles restent les meilleurs modèles que nous ayons pour aider la société.